“ Il y a des centaines d’années, les sciences et les arts étaient enseignés ensemble. Maintenant nous les enseignons de manière totalement indépendante. En fait, l’un est presque étranger à l’autre. Pensez à l’endroit où les médecins sont formés et à la façon dont ils sont formés. Il y a une idée que la science est sérieuse et l’art est frivole. Ce qui bien sûr n’est pas vrai ”. Nick Knight

 

 


Le techwear

Selon “ Bonne gueule ”, un site de conseils de mode masculine, le techwear “ désigne une catégorie de vêtements incluant des tissus spéciaux avec des technologies avancées, des techniques de construction qui vont au-delà du traditionnel ainsi que des coupes permettant une mobilité maximale ”. Le techwear est devenu réalisable grâce à la technologie des vêtements d’alpinisme des années 70 qui contenait les premières vestes Gore-Tex (un tissu imperméable qui permet d’évacuer la transpiration). Autrement dit, le techwear regroupe des vêtements avant-gardistes, techniques, confortables et utiles. Ils sont également souvent résistants à l’eau et isothermiques. Ils sont pensés et créés en prenant en compte le mouvement des articulations pour optimiser le confort et nous faciliter la vie. Ils représentent un parfait équilibre entre la beauté et l’utilité. D’ailleurs, la dimension “ ingénierie-futuriste ” est  tout de même plus présente dans la confection du vêtement que dans son esthétisme. Une des marques les plus avancées dans ce domaine est la marque “Acronym”. On peut également citer le pantalon “Magnetic Tech Cargo Pants” de la marque Heliot Emil, contenant des poches magnétiques amovibles et détachables pour le lavage.

Le projet
Dans ce travail, j’ai cherché à amener la mode, et plus précisément la mode futuriste (tels que les vêtements connectés, les tissus intelligents, les influences robotiques, l’intelligence artificielle), dans un univers où on ne l’attend pas forcément : celui du médical. A priori, on pourrait penser que ces deux termes n’ont rien en commun. Mais certains créateurs ont prouvé qu’il y avait bien une interaction entre les deux comme le démontre le défilé Gucci Automne Hiver 2018-2019 dont la scénographie est une parfaite reproduction d’une salle d’opération. Si les néons blancs, les murs verts, et l’électrocardiogramme ont su trouver leurs places lors d’un défilé d’une des plus grandes marques de Luxe, on pourrait y voir le signe d’un rapprochement entre deux mondes qui à priori ne communiquaient pas.

Dans le même ordre d’idées, il m’a semblé intéressant d’envisager un monde où l’utilité et la beauté ne feraient plus qu’un (en suivant la logique du techwear). Où la mode jouerait un rôle fondamental, se détachant de son cliché de “superficielle” qui lui colle à la peau, en agissant sur la psychologie d’un patient et/ou à son rapport à l’image à la suite d’un changement corporel ou d’une pathologie. Un temps où les habits nous fourniraient des signaux relatifs aux dysfonctionnements du corps, utilisant l’apparence plutôt que la parole. Les dispositifs médicaux, sortis de leurs milieux “aseptisés”, pourraient devenir les dernières tendances mode et les environnements hospitaliers de véritables lieux design, laissant oublier aux patients qu’ils sont dans un centre de soins.

Ces deux secteurs, une fois associés, pourraient mettre leurs points forts respectifs en commun et nous offrir une nouvelle version de la société. Ce rapprochement pourrait être facilité par le fait qu’ils ont déjà un pilier commun : le corps.

La réalisation
Au milieu de plusieurs artistes qui démontraient une volonté de changer l’esthétisme du monde médical et une mise en place de moyens pour y arriver, je me suis demandé quelle pouvait être mon implication. Que pouvais-je mettre en place à mon échelle, pour améliorer cette esthétique ? J’ai choisi dans un premier temps de me pencher vers le stylisme, en créant une tenue médicale esthétique contenant trois pièces (une blouse, un gilet et une cagoule col roulé). Dans un second temps, j’ai voulu populariser cette esthétique grâce à l’édition et plus particulièrement grâce à la création d’un magazine de mode dans lequel j’ai eu différents rôles tels que celui de directrice artistique, de graphiste, de photographe ou de rédactrice.

 

 

 

La tenue
La tenue médicale se base sur deux concepts.
Le design (l’esthétique, la beauté, le style, l’harmonie du vêtement) et la pratique, la facilité (inspiré du techwear). J’ai voulu inclure des matières et des coupes de constructions censées faciliter le port du vêtement tout en amenant un style harmonieux. L’objectif premier des médecins étant de soigner des patients, la création d’un ensemble à la mode qui ne facilite en rien le métier, n’était pas constructif et aurait peut-être même eu plus d’apports négatifs que positifs. J’ai donc voulu dépasser et améliorer le design des blouses actuelles, en y ajoutant une dimension pratique.

Cette tenue est composée de trois pièces : La première est une blouse médicale classique revisitée grâce à des poches en PVC souple placées sur le devant et sur le coté du bras. La deuxième est une pièce “ col roulé masque ”  , en lycra basée sur le principe d’une cagoule et du masque. Cette pièce possède deux trous aux niveaux des oreilles et évite donc les élastiques qui font tenir le masque. Elle protège le cou, la bouche et le nez. La dernière pièce est un gilet sans manche customisé, en PVC souple, inspiré du gilet tactique. Il possède deux grandes poches ainsi qu’une poche particulière sur la poitrine. Ce gilet peut être porté par dessus la blouse pour plus de protection. Il est facile de le nettoyer en passant un essui-tout avec du désinfectant car le PVC ne va pas dans une machine à laver.

 

Le magazine
Hybride est un magazine périodique axé principalement sur le corps. Chaque numéro évoque un sujet plus précis, dans ce cas-ci, il s’agit de la mode médicale. Il est composé de différents articles sur le même thème comme par exemple les prothèses artistiques, les bijoux médicaux, les designers et expositions scientifique-artistique et les mannequins en situation de handicap. Il contient également des interviews, des citations et des shooting photos. Ce numéro contient trois shooting effectués dans différents lieux. Le premier nommé “techwear médical”, a pour but de mettre en avant ma création stylistique. Le deuxième, “Chez le kiné” représente les rendez-vous médicaux qui se déroulent entre un kiné et un patient. Ce shooting réalisé en dehors du “cabinet médical classique” se concentre sur les positions adoptés pendant la consultation afin de soigner ou de soulager certains endroits du corps. La dernière séance photo que j’ai réalisée s’intitule “Postures”. L’idée principale était de supprimer tous les éléments présents autour de la personne en retenant uniquement sa position et en la reproduisant dans un autre contexte. Un contexte plus épuré, plus léger, de manière à attirer notre attention uniquement sur le corps et non sur les objets autour de celui-ci. Dans cette optique, cinq postures ont été reproduites. Celles “ dans son lit ”, “  devant  l’ordinateur ”, “ dans le canapé ”, “ en s’étirant ” et “ en attendant  ”. Un résultat où le corps est au centre, sans artifice, à la limite de la danse et du mouvement.

L’envers du décor
Cette vidéo a pour but d’illustrer l’envers du décor et la construction du magazine, que ce soit au niveau de la réalisation des shootings (photographes, mannequins, vidéastes), des lieux/décors ou encore de l’habillage des mannequins. L’idée générale se rapproche de la “bande annonce”. Ce genre de montage pourrait être utiliser afin d’annoncer la sortie du prochain numéro du magazine. Le jury virtuel ne permettant pas de feuilleter le magazine directement en main propre, le toucher des papiers ou l’analyse des couleurs et de la qualité de l’impression était impossible. Il a donc fallu repenser mon support de manière à le présenter autrement que par des simples images statiques. J’ai fait le choix d’imprimer mon magazine, de filmer certaines parties et de les intégrer dans cette vidéo. Une manière de dynamiser un support qui risquait d’être un peu trop plat. J’ai également réalisé des gifs qui montrent les mises en page du magazine.