La violence psychologique dans le couple :
la mettre en scène et la traduire en dispositifs graphiques

Nous pouvons constater que la violence conjugale est de moins en moins taboue, elle est bien présente dans les médias, mais elle y est trop souvent généralisée et stygmatisée par des coups. La violence psychologique, plus subtile, est plus difficile à faire comprendre. Il est intéressant de s’interroger sur la représentation de cette forme de violence invisible afin de mieux en parler.

J’ai pour objectif de matérialiser ces violences, de proposer un projet qui servira à toute personne engagée dans une relation de couple de se situer et d’éventuellement déclencher une réaction.

Je fais le choix de l’exprimer de manière poétique. Pour cela j’ai demandé à quiconque désirait le faire, de parler de son expérience au sein d’une relation de ce genre et témoigner auprès de moi. Seules des « victimes » ont répondu; ce travail s’exprimera donc à travers leurs yeux. Je leur ai demandé de poser une image sans aucune contrainte, sur leur vécu. Ces témoignages sont la base des mes visuels.

Pour l’installation je vous demanderais de vous projeter. Vous êtes dans mon appartement. Le choix de ce lieu est imposé par les conditions sanitaires mais reste judicieux pour ce cas. La violence conjugale existe principalement dans la zone intime du couple, c’est-à-dire dans leur propre domicile. Les meubles sont recouverts de draps blancs comme lors d’un déménagement. Cela fait référence à un lieu qui n’est plus vraiment chez nous, complètement dépersonnalisé, un endroit où on ne se sent plus en sécurité, qui ne nous appartient plus, lorsqu’on est victime de violence conjugale.

2 vidéos sont projetées sur les murs blancs, l’une en face de l’autre comme une conversation entre une personne et son conjoint, entre une victime et son agresseur. Synchronisées, elles sont sensées être visionnées en même temps et en boucle.

J’ai la volonté de ne pas dévoiler le genre de ces deux personnes afin de permettre à n’importe quelle combinaison de couple de s’identifier. Même si les violences conjugales touchent principalement les femmes, je pense qu’il est nécessaire de ne pas oublier les hommes; il serait plus novateur d’envisager une communication qui ne stigmatise ni l’un ni l’autre. J’utiliserai donc des draps blancs pour camoufler le visage. Ces draps sont également le symbole de l’intimité, de la dépersonnalisation, de l’anonymat et de l’étouffement.

Ces vidéos sont une traduction du cycle de la violence étudié lors de mon mémoire, il décrit une évolution croissante vers des phases de crises et de retour à la normale comme si de rien n’était.

J’ai réalisé ces affiches sur base des même témoignages. Ces mots sont l’expression de sensations décrites une fois de plus par les victimes de violence psychologique. Ne reconnaissant plus leur véritable valeur, elles deviennent comme transparentes; s’accordant aux besoins de leur conjoint, elles s’effacent.

peine - fatigue - dépendance
disparition - vide - solitude
fragilité - honte - abandon

Et vous ? Que se passe-t-il sous vos draps ?